Voici un petit article paru dans le numéro du 2 mars 1913 du « Cri de Paris » ( périodique hebdomadaire politique et satirique dont la devise est « Tout savoir et tout dire » ). Il y est question de Mme Fallières, de ses poules… et de Rambouillet.
Pour en rappeler le contexte : Armand Fallières est Président de la République du 18 février 1906 au 18 février 1913. Il ne se représente pas, et son épouse et lui-même quittent donc le Palais de l’Elysée, et le château de Rambouillet. Leur départ fait l’objet d’un certain nombre de caricatures, et de commentaires, comme ce joli petit récit que je recopie intégralement ici :
Cour et basse-cour
Quand Mme Fallières s’installa pour la première fois à Rambouillet, elle s’étonna de voir le poulailler du Château presque vide. Et comme elle possédait au Loupillon tout un lot de volailles magnifiques, elle fit venir de sa propriété trente-quatre poules auxquelles furent adjoints, par l’Administration des Domaines, deux superbes coqs de Houdan.
Ce fut un poulailler idéal, digne d’être chanté par l’auteur de Chantecler .
Sur le point de déménager, il y a un mois, Mme Fallières réclama son poulailler et l’Administration des Domaines restitua trente-quatre poules à Mme la Présidente.
Celle-ci se récria :
– Depuis sept ans, dit-elle, mes poules ont procréé.
Mais M. Lebureau ne voulut rien entendre, car, affirmait-il, les poules de Mme la Présidente ont été mélangées avec les poules du Château laissées par Mme Loubet. Et puis, les coqs appartenaient à l’Etat, et, sans eux, il n’y aurait pas eu de poussins
– Pardon, réplique Mme Fallières, les coqs de l’Etat sont morts de vieillesse depuis plusieurs années, et les deux coqs qui sont l’orgueil de la basse-cour de Rambouillet aujourd’hui ont été pondus et couvés par mes poules.
– Mais ils sont les fils de mes coqs, répond M. Lebureau
Les volailles de Rambouillet doivent-elles appartenir à Mme Fallières qui a prêté ses poules, ou à l’Administration qui a fourni les coqs ?
Il faudra peut-être une décision du Conseil d’Etat pour résoudre ce grave problème. «
L’article s’arrête ici : vous ne saurez donc pas si Mme Fallières a eu, ou non, satisfaction. Et n’attendez pas de moi une hypothèse personnelle, qui ne serait étayée par aucune source sérieuse !…
Si le sens de l’économie de Mme Fallières est moqué ici, de même que la caricature ci-contre, où Armand Fallières retourne dans son domaine de Loupillon, avec quelques millions et chargé de « souvenirs » empruntés au Mobilier National, il s’agit là de critiques bien légères, comparées aux attaques qu’il a subies durant tout son mandat.
Comment s’en étonner ? Armand Fallières a cessé sa carrière politique, et n’est donc plus une cible intéressante. Déjà les caricaturistes affûtent leurs crayons contre Raymond Poincaré !..
Christian Rouet, chroniqueur à Yveline.Org
L’article complet, avec une étude de la satire et de la censure à travers les siècles est à lire sur le site du Pays d’Yveline : cliquer ici – Le Pays d’Yveline, un lieu de mémoire dédié au Pays d’Yveline : yveline.org – Crédit photo : Christian Rouet